En cet été de tous les conflits, Gaza a occupé tous les esprits avec ces photos insoutenables de corps déchiquetés, rediffusées en boucle, de roquettes aveugles dans le ciel d’Israël, comme pour anesthésier toute réflexion, éveiller l’émotion seule et attiser de part et d’autre des sentiments de haine et de vengeance. Sentiments qui se sont transformés en cris de « mort aux juifs », en attaques de synagogues et en saccage de magasins tenus par des juifs. Face à ces débordements les pouvoirs publics ont su maintenir l’ordre, en sanctionnant sévèrement les violences antisémites évoquant douloureusement celles du nazisme. De leur côté la réaction unanime et commune des autorités spirituelles des communautés juive, musulmane et chrétienne a été d’appeler au calme, au respect de l’Autre et à la prière pour que la négociation l’emporte sur les conflits, avec une pression forte sur les responsables politiques de tous bords afin qu’ils redoublent d’initiatives en vue de parvenir à un cessez le feu durable et à une reprise des négociations aboutissant à la reconnaissance et à la coexistence de deux états vivant en paix dans des frontières sûres, viables et reconnues. Ceci pour Israël et la Palestine (dont Gaza).

Pendant ce temps, la Syrie était oubliée, qui est entrée dans sa troisième année de guerre, avec près de 190 000 morts, très majoritairement des civils tués sous les bombes, plus de trois millions d’autres civils déplacés et la destruction de villes entières. L’Irak est ravagé par un conflit de plus en plus meurtrier entre sunnites et chiites, exacerbé par les ambitions d’extrémistes – « l’État islamique » – qui veulent rétablir un « califat » et exterminer l’importante minorité chrétienne de ce pays ainsi que les Yazidis, qui s’efforcent de se réfugier auprès des Kurdes. En Egypte même, malgré un début de retour au calme après les exactions des Frères musulmans, les Coptes restent l’objet d’attaques contre leurs églises et leurs personnes, simplement en raison de leur foi chrétienne, eux aussi l’une des plus anciennes communautés de cette région, berceau du christianisme. En Libye on assiste à une recrudescence des violences suscitées par des extrémistes qui se manifestent jusqu’au Mali et en Centre Afrique, ou d’autres extrémistes, chrétiens cette fois-ci, se montrent tout aussi violents. Au Soudan et au Yémen, la violence peut à tout instant exploser.

Rien d’étonnant à ce que des réfugiés, par dizaines de milliers, s’efforcent mois après mois de franchir la Méditerranée entassés dans des embarcations de fortune, pour parvenir à ce « havre de paix » qu’est l’Europe, en l’occurrence l’Italie qui fait face presque seule à cet afflux. Ils sont 100 000 depuis le début de 2014 à avoir tenté la traversée et plusieurs milliers à avoir péri noyés.

Et pendant ce temps, aux frontières orientales de l’Europe, une « guerre froide » modèle XXIe siècle ressurgit entre l’Occident Euro-Atlantique et une Russie nationaliste – dont le czar est nostalgique de l’ère soviétique – l’enjeu étant l’orientation de l’Ukraine. Ici aussi, comme à Gaza, la raison doit l’emporter sur les sentiments : l’Ukraine peut rester attachée autant à ses voisins européens, qu’à la Russie, dont elle est l’un des berceaux, et à servir de pont entre les deux ensembles.

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