Rencontre… Cet été, lundi 18 août 2025, j’ai eu la grande chance de rencontrer un vieil adhérent de la Fraternité d’Abraham en la personne du frère Abel, chez lui, sur l’île de Sein. Abel Touzet a bien connu l’un des fondateurs de notre association, André Chouraqui. Il fut proche de lui pendant de longues années, d’abord à Neuilly, puis 3 fois par an durant les 6 dernières années de son ami, à Jérusalem.

André Chouraqui, après avoir lu avec grand intérêt le premier livre de frère Abel, « Passeurs d’âmes », lui demanda de venir travailler avec lui à Jérusalem. Il écrivit la préface de son deuxième livre « Dans les pas du petit prince »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Il n’est pas interdit d’apprendre à se bien conduire. Avant que les Nations deviennent justes, il faudra que les êtres humains apprennent à devenir Humains. Le frère Abel Touzet est l’un de ces petits instituteurs sans prétention qui ont toujours proposé aux femmes et aux hommes de les aider à devenir Humains. Il est très concerné par ce qui s’est passé durant la Shoah et œuvre à ce que de telles horreurs ne se reproduisent pas. C’est l’objet de son livre. Antoine de Saint-Exupéry, c’est peu connu, a écrit également son livre Le Petit Prince à cause de la Shoah. Ce merveilleux Conte de fées, il l’a dédié à Léon Werth, tout en demandant pardon aux enfants de l’avoir dédié à une grande personne. Qui était « ce meilleur ami que j’ai au monde », dont nous parle Tonio en la dédicace de son livre ? Léon Werth était un porteur d’étoile jaune. Léon Werth avait travaillé au « Journal du Peuple » d’Henri Fabre. Henri Jeanson nous dit de lui : « Libertaire, pacifiste, anti-militariste, familier de Vlaminck, ami de Mirbeau et de Séverine, critique d’art écouté, Léon Werth avait écrit un des plus beaux livres sur la guerre de 14 : « Clavel Soldat ». Serviable et généreux en dépit d’une pauvreté acceptée avec dignité et bonne humeur, Léon Werth avait pour toute richesse l’amitié de Saint Ex… Qui lui-même était toujours à court d’argent. » Comment Saint-Exupéry pouvait-il être à la fois l’ami d’un Mermoz – Croix-de-Feu sur les bords – et d’un anarchiste tel que Werth ? Il est vrai qu’il disait : « Si je diffère de toi, loin de te léser, je t’augmente. » C’est aussi à l’intention de Léon Werth, son aîné de 23 ans, Juif traqué par la Gestapo, que Saint-Ex a écrit sa Lettre à un otage. En voici un court extrait : « Celui qui, cette nuit-ci, hante ma mémoire, est âgé de cinquante ans. Il est malade. Et il est juif. Comment survivrait-il à la terreur allemande ? Pour imaginer qu’il respire encore, j’ai besoin de le croire ignoré de l’envahisseur, abrité en secret par le beau rempart de silence des paysans de son village. Alors seulement je crois qu’il vit encore… » Tous les mystiques parlent la même langue, ils parlent d’amour et de pardon. Sans doute, viennent ils d’une même Planète, du même astéroïde B 612 que le Petit Prince. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne meurent jamais. Mon ami Abel est l’un de ces mystiques. Je sais que le frère Abel est heureux de voir mon nom près du sien, sur ce livre. Je m’en réjouis beaucoup. »

André Chouraqui Jérusalem, janvier 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous avons donné écho sur notre site des réalisations de frère Abel, et des nombreuses personnes qui l’entourent, venant d’horizons divers. Ensemble, aidés en cela par André Chouraqui, ils ont créé en l’an 2000 un monastère œcuménique qui reçoit aussi bien des athées convaincus que des adeptes des différentes religions. En ce « Centre d’études pour la Paix », chacun vient à donner un réel sens à sa vie. C’est un lieu intergénérationnel et d’éveil au vivre en paix. Et, comme frère Abel l’écrivait « Je crois bien que je sens aujourd’hui encore, en mon cœur, la présence de mon vieil ami et frère, Natân André Chouraqui […] Bravo à vous et aux guerrières et guerriers de Paix ! Le Bien à vous, pour le bien de tous les êtres. » https://www.fraternite-dabraham.com/le-monastere-du-gai-rire/ Sur le site dédié, j’ai été interpellé par ces lignes : « Ces Retraites s’organisent autour d’un Enseignement traditionnel donné par le frère Abel Touzet, moine séculier et éducateur spirituel, suivant la demande de ses maîtres tibétains, Dilgo Khyentsé Rinpoché et Tulku Pema Wangyal Rinpoché.»

https://karuna-ceprobreiz.org/

Ainsi, j’ai été heureux d’aller à la rencontre de cet homme profondément chrétien, tourné vers la recherche du message initial de Jésus, ce qui le conduisit jusqu’au Tibet et au Népal. Cette année encore, à l’âge de 79 ans, il était avec un groupe de 20 fidèles, dans un monastère perché dans les montagnes du Ladakh. « J’ai personnellement approfondi le sens de la prière avec les moines bouddhistes » m’a-t-il confié.

J’étais encore sur le bateau lorsque, parmi la vingtaine de personnes présentes sur le quai, j’ai croisé le regard d’un homme à l’apparence solide, portant une large chemise de marin, le visage ceint d’une belle barbe blanche bien taillée. Bien que nous ne nous étions jamais vus, nous nous sommes reconnus de suite ! Chaleureusement accueilli dans la maison qu’il habite depuis 1980, nous avons partagé le repas d’un délicieux déjeuner, en compagnie du frère Eric et d’une amie de longue date, Annie. Abel avait suivi notre Assemblée Générale par visio ! Comme de nombreuses personnes, il espère vraiment que la revue de la Fraternité d’Abraham va continuer d’exister sous son format papier. Lorsque j’ai interrogé Abel sur son histoire, quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre qu’il fut pendant huit ans plongeur scaphandrier, puis huit ans steward sur longs courriers Air France, puis marin solitaire et solidaire sur un petit voilier : « sous l’eau, dans l’air, puis juste entre l’eau et le ciel ! ». Abel est devenu navigateur à la voile vers les îles déshéritées du tiers-monde, et pendant près de trente années, il achemina dans certains pays du continent africain et du Nordeste Brésil, des biens et des médicaments pour les démunis. A 75 ans, sur un vieux Muscadet de 6,50 m, il descendait encore l’océan jusqu’au sud du Sénégal, remontait vers les îles du Cap vert, pour rejoindre les Caraïbes, et retraverser l’Atlantique en solitaire pour revenir sur son île ! Pour cet homme de cœur et de fraternité, alors que ses navigations et ses rencontres lui avaient fait choisir de vivre à Sein, ce fut difficile d’être mal reçu, parfois de façon brutale, par certains habitants de l’île… Il était l’étranger, mal vu, mis à l’écart. Dans les années 80, la vie était rude à Sein. Pas d’eau courante, peu d’électricité, sur une terre minuscule, battue par les vents et les pluies. Il vécut parfois jusqu’à 18 mois sans revenir sur le continent.

Méditation, prière, lecture. « Il y a 40 ans, 90% des gens me voyaient d’un mauvais œil et ne m’aimaient pas. A présent, c’est l’inverse ! » A la fin du repas, frère Abel propose de m’accompagner à la découverte de l’île. J’accepte avec joie. Arrivé avec près de 200 touristes sur le bateau, je suis probablement un des rares à avoir cette opportunité, découvrir l’île avec un tel guide ! J’ai pu ainsi en apprendre beaucoup sur l’histoire de ce lieu tout à fait unique. Ayant lu les romans d’Henri Queffelec, dont le formidable « Un feu s’allume sur la mer » qui raconte l’histoire de la construction du phare d’Ar Men, durant cette visite j’ai été aux anges ! Nous passons les dédales des petites ruelles, puis devant le monument dédié aux résistants (l’île de Sein est « Compagnon de la Libération »), puis nous longeons la mer.

Abel me conduit tout au bout de l’île, devant des rochers-monuments imposants en granit. Un lieu dont les recherches historiques indiquent qu’il fut depuis quatre à cinq millénaires un site de prières et de spiritualité. Avant même que les druides soient pourchassés par le pouvoir romain… La présence de menhirs et de dolmens évoque les temps les plus anciens. Devant une chapelle dédiée à Saint Corentin – considéré selon la tradition comme l’un des Sept saints fondateurs de Bretagne continentale – nous devisons. Minuscule chapelle mais haute en spiritualité, cette pointe de granit de mer fut reconstruite par l’abbé Marzin et Victoire, la plus belle âme de l’île, à l’endroit même où vécut en ermite bâtisseur, un moine du 19ème siècle. Ayant vécu de nombreuses années en prière et méditation, frère Abel n’en est pas moins tourné vers autrui. Membre de la Fraternité d’Abraham depuis tant d’années, il sait l’importance du dialogue interreligieux et de la recherche de compréhension mutuelle, sur la base du caractère sacré du vivant. « J’aimais beaucoup le pape François, j’étais très touché par ses signes d’ouverture à l’autre en tant qu’être humain. Il a rencontré le grand imam Ahmad Al-Tayyeb de la grande université Al-Azhar du Caire, c’est significatif. Le nouveau pape marche sur ses traces et c’est bien ! » Abel m’invite à découvrir le reste de l’île en cheminant tout seul et méditer, ce que je fais jusqu’à reprendre le bateau de retour au continent, en début de soirée.

Une journée magnifique et mémorable.

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A la demande de frère Abel, vous trouverez ci-dessous un message de son association.

S’il sait être seul au milieu de l’océan, il sait aussi aider celles et ceux qui sont trop seul.e.s :

 

Faites le savoir autour de vous…

L’association Karuna Ceprobreiz  : un lieu intergénérationnel qui encourage à sortir du mal-être et de la solitude, aussi bien des jeunes qui ne trouvent pas de sens à leur vie, que des vieux qui souffrent de leur isolement.

1 jeune retraité ou 1 couple dynamique pour nous aider à animer le lieu

et 2 jeunes disponibles pour une mission de 6 à 8 mois dans le cadre du service civique,

afin de se préparer à un métier d’aide sociale.

https://karuna-ceprobreiz.org/

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